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AMADOU SYLLA de "Sos Casamance" : « Pourquoi la Dic convoque d’anciens ministres de la Gambie ? »

Vendredi 10 Février 2017



Dans une interview accordée à Flashinfos.net, le président de l’association « Sos Casamance » s’est prononcé sur la question du processus de paix en Casamance, la gestion du dossier par le régime du président Macky Sall non sans plaider pour l’organisation d’une conférence nationale autour du dossier Casamance. Seulement, Amadou Sylla qui a dénoncé l’option militaire dans les règlements de crises politiques, fustige la démarche de l’Etat du Sénégal dans la gestion de la crise politique en Gambie. M. Sylla pense que la diplomatie Sénégalaise n’a pas joué franc jeu dans cette crise poste électorale de ce pays voisin. Candidat aux prochaines députations du 30 juillet 2017 à la Diaspora, Amadou Sylla de « Sos Casamance » a indiqué qu’une fois élu, il sera un député au service du peuple, et non un député de bureau.


AMADOU SYLLA de "Sos Casamance" : « Pourquoi la Dic convoque d’anciens ministres de la Gambie ? »
Comment se porte l’association ?
 
 
L’association se porte bien, elle se développe. Ce n’est pas toujours facile l’engagement associatif mais, on essaye. Surtout une association comme la nôtre : association de migrants, association de solidarité internationale, ce n’est pas toujours facile. Donc, ça a été une très bonne expérience pour nous d’une part de faire beaucoup de chemin, un très long chemin. Parce que de temps en temps, on se dit : on vient d’où ? Mais, on avance, on essaie de tenir et je pense que de là aussi, c’est des valeurs que nous portons. C’est une question de conviction pour nous de notre obligation morale à devoir aider la Casamance à avoir une image positive. Il faut déconstruire cette image négative, ces stéréotypes qui planent sur la Casamance d’une certaine manière. Pour cela, je pense qu’il faut qu’il y ait des hommes et des femmes qui s’engagent dans ce combat de déconstruction. En ce qui nous concerne, nous sommes dans cette dynamique-là, profondément engagés. En marge de cela, il faut aller avec les hommes et des femmes capables d’apporter des réponses aux besoins des gens. Il faut apporter une attention aux préoccupations des gens. C’est ce que nous faisons et je crois que de ce point de vu, ça va.
 
Lors de son séjour en 2014 à Ziguinchor, le chef de l’Etat avait déclaré la Casamance une zone de développement. Est-ce que vous avez noté des avancés à ce niveau ?
 
D’abord, c’est par rapport à quoi ? Je crois qu’on a entendu beaucoup de jargons, beaucoup de slogans, il va falloir mettre un contenu dans ces trucs-là. Zone prioritaire, ça été annoncé, ça a suscité beaucoup d’espoir. Ils ont amené des bateaux, les gens ont applaudi. Mais, je pense qu’après, il faut aller dans le font des choses. La Casamance a beaucoup de potentialité économique. Il faut du sérieux pour traiter toutes ces questions-là. Il faut qu’il y ait du professionnalisme dans le traitement de cette question, on ne peut pas le faire dans l’amateurisme. Il faut former les gens à la base, il faut les aider à mieux être en lien par rapport à leurs compétences, leurs savoirs, de sorte qu’avec les ressources dont dispose la Casamance ces savoir-là puissent impacter sur la mise en valeur de ces ressources-là. Il y’a de bonnes volontés qui veulent toujours faire, mais malheureusement ça ne suffit pas. Il faut des mesures d’accompagnement ; malheureusement c’est avec ces mesures d’accompagnement qu’il  y’a des problèmes. Parce que, normalement, si réellement la Casamance est une zone prioritaire, on devrait pouvoir mettre des mesures d’accompagnement fiscales, des mesures d’accompagnement sociales…, en tout cas, tout ce qui peut inciter un entrepreneur ou quelqu’un qui a de l’ argent, un bailleurs de fond, à s’orienter dans ces zones-là et à pouvoir effectivement investir et contribuer à cette dynamique économique. Maintenant, c’est déjà une bonne chose de vouloir faire de la Casamance une zone prioritaire, comme l’a promis le président. Si après l’intention ne suit pas, je crois qu’il est du devoir de chacun de faire en sorte que la promesse devienne réalité. Pour cela, il faudra que chacun, principalement les Casamançais, s’approprie la promesse, essayer d’accompagner, d’aider le Président à la respecter quitte à en faire une exigence. Parce qu’il y’a toujours des rapports de forces dans toutes les situations. La politique, c’est des rapports de force. L’Etat et le citoyen, c’est un rapport de force. Donc, ces rapports de forces, il faut savoir les construire quelques part, et puis les mettre au crédit des populations, et pour cela, il faut une dynamique collective. Que ce soit les entrepreneurs, que ce soit les opérateurs économiques, que ce soit le citoyen lambda, que tout le monde se mette dans la dynamique pour qu’il y ait un peu de concession dans ce rapport de force qui permettra à chaque fois qu’un homme politique ou l’Etat fait des promesses qu’il puisse être amener à les matérialiser.
Il y’a la question de la discontinuité territoriale qui est qu’à même un enjeu important.
 
Qu’entendez-vous par discontinuité territoriale?
 
Il s’agit de la situation de la Casamance, sa position géographique par rapport au reste du pays. Parce qu’on ne peut pas développer une région qui semble être coupée du reste du Sénégal. Il est donc important que l’Etat prenne à bras le corps la question de l’enclave gambienne. Il ne faut pas qu’on s’accommode à la considérer comme un blocage. Parce qu’un Etat ne doit pas dépendre des aléas naturels de cette nature-là. C’est la nature qui a fait qu’on n’a pas une terre pleine entre la Gambie et le Sénégal. Malheureusement c’est une réalité historique qui est là et qui fait que cet Etat a été créé à l’intérieur du Sénégal. Mais je crois qu’après tout, il faut analyser la situation de façon très lucide. Le Sénégal doit s’assumer face à sa responsabilité et à son destin, personne ne le fera à sa place.
 
Comment concevez-vous cette assumassions à laquelle vous invité le Sénégal?
 
C’est très simple ; vous avez un pays qui est complètement divisé en deux. Cette division a des conséquences sur sa sécurité nationale, sur son intégrité territoriale du fait des sentiments de frustration qu’elles génèrent. Parce que la distance fait que les gens considèrent qu’ils ne font pas partis de cet espace national. Donc, même s’il y’a des arguments historiques qui peuvent être développés, les faits restent quand même une réalité tangible. On n’aura pas à aller chercher plus loin, c’est des faits constants. C’est pourquoi, cette discontinuité territoriale, il faut la supprimer. Mais comment ? A mon avis, il faut construire des autoroutes. Je ne vois pas pourquoi, on ne peut pas le faire ; il faut construire les routes de contournement, c’est possible. Il faut relier l’intérieur du Sénégal qui permet au voyageur de quitter facilement Dakar et d’aller en Casamance. Nous comprenons la position de la Gambie. Elle est stratégique. Sa position lui permet en effet de pouvoir développer un rapport de force assez équilibré avec le Sénégal. Il appartient au Sénégal d’être suffisamment convaincant pour arriver à montrer à la Gambie qu’il n’y a qu’une seule alternative à la situation. C’est de supprimer l’enclavement de la Casamance. Et le Sénégal à tous les arguments pour cela, car un bras de fer entre les deux pays n’arrangera pas la Gambie. Quelque soit l’Etat qui serait à la place du Sénégal, il sera obligé de coopérer parce que l’avenir de la Gambie est dans cette collaboration. Il faut créer une zone de coprospérité entre les deux Etats. Ça c’est de l’intelligence, ça ne demande pas des rapports de forces. Ce n’est pas des rapports de forces militaires parce que c’est l’erreur la plus catastrophique que souvent on commet. Et ce qu’on voit en ce moment dans la situation actuelle entre le Sénégal et la Gambie, c’est ce même rapport de force qui a existé au sein du Sénégal lorsqu’il s’est agit de régler la crise casamançaise et on a vu le résultat. Donc, le rapport de force ne règle rien du tout. Il faut privilégier le dialogue, il faut privilégier l’échange, il faut avoir de la hauteur, il faut de la patience. L’option militaire doit être la dernière solution. Je pense qu’on ne peut plus se permettre de commettre l’erreur de faire recours à la force militaire sans avoir eu à épuiser toutes les voies de solution pacifiques. Il est tout à fait heureux que dans le cas de la Gambie, on ne soit pas arrivé à un conflit armé. Même s’il faut le souligner pour le déplorer, « l’intention du Sénégal de faire la guerre en Gambie était bien manifeste ».
 
Vous sembler dénoncer l’attitude de l’Etat du Sénégal dans le règlement de la crise politique en Gambie ?
 
Moi, je suis militant de la Paix. Je milite en faveur des valeurs de Paix, de non-violence, donc je ne peux pas cautionner du tout un engagement militaire. Donc, quelques soient les raisons que vous allez évoquer pour me convaincre, je vous direz que vous êtes passé à côté de la plaque d’autant qu’il y’a beaucoup de levier à côté sur lesquels, on peut effectivement travailler. La preuve en est qu’on n’est pas arrivé à un conflit grâce à l’intervention et du travail acharné du président Alpha Condé et du président Mauritanien.
 
Est-ce à dire que vous remettez en cause l’attitude de la diplomatie Sénégalaise dans la gestion de la crise en Gambie ?
 
La diplomatie n’a pas réellement joué son rôle, parce qu’au lieu de se mettre dans une dynamique diplomatique pour régler un problème politique, elle a utilisé l’arme militaire! Le Sénégal ne s’est même pas fait l’obligeance de demander une autorisation à la Cedeao, ou du conseil de sécurité. Il a plutôt agité l’option militaire très tôt. D’ailleurs, avec le temps, on se pose même la question de savoir si le Sénégal n’a pas tenté d’utilisé la Cedeao pour arriver à régler ses propres problèmes. Et que derrière, la Cedeao s’est rendu compte effectivement de cette stratégie du Sénégal. Je n’affirme rien, j’analyse…Parce que quand on voit le contexte avec ce qui s’est passé, au sommet de l’Union Africaine, avec la candidature d’Abdoulaye Bathily, on a reçu un coup de poignard. Le Pr Abdoulaye Bathily qui est un éminent professeur, un monsieur respectable et très aimé du continent Africain et qui a fait une campagne extraordinaire, et qui se retrouve dans une situation d’échec. Ce n’est pas la personne de Bathily, c’est la diplomatie. Moi franchement, je serai le Ministre des affaires étrangères, j’aurai démissionné….Une diplomatie demande de la cohérence, mais, c’est comme si on a une diplomatie qui manque de cohérence. Maintenant sur ce qui s’est passé en Gambie, on parle de la Cedeao, mais là, on comprend mieux que c’est une affaire du Sénégal. Des anciens ministres qui appartiennent à un pays étranger sont convoqués dans une institution comme la DIC (Ndlr : Division des Investigations Criminelles), je me pose des questions, qu’est-ce que la DIC a, à faire dans des affaires d’un pays voisin.
 
« Il faut l’organisation d’une Conférence Nationale en Casamance…»
 
Au sujet de la crise casamançaise, je suis d’avis que le Sénégal a ses intérêts. Maintenant, je ne sais pas c’est quoi ses intérêts. Si c’est la Casamance, je pense qu’ils ont tout faux. Ce qui se passe en Casamance est un problème purement politique qu’il faut régler politiquement. Vouloir le régler militairement vaille que vaille, me parait absurde. La crise a duré 34 ans sans que l’option militaire n’arrive à une solution définitive. C’est pourquoi on ne peut pas me convaincre moi que la solution militaire serait pertinente en Casamance. Cela tombe sous le sens. Donc, vouloir mobiliser les Sénégalais ou bien l’opinion autour de cette option-là, ressemble plutôt à de l’arnaque. Il faut quand même être sérieux en un moment donné. Il faut regarder les choses en face et trouver des solutions beaucoup plus appropriées. Quand on trouvera des solutions, on les appliquera et cette question de discontinuité entre la Casamance et le reste du Sénégal disparaîtra. Au-delà, il faut appliquer une politique de discrimination positive en faveur de la région. Parce que la Casamance peut jouer un rôle d’intégration au niveau de la sous-région. La Casamance a elle seule peut, suivant la stratégie qui sera mise en œuvre par le pays pour solutionner l’équation de la crise qui y sévit, servir de réponse pertinente aux difficultés que le Sénégal éprouve dans ses relations avec ses voisins de la sous-région. Non seulement ça va faciliter l’intégration entre le Sénégal et la Gambie, parce qu’après, on est un même peuple, on a la même culture, on a la même géographie, on a la même histoire. Ça peut même aider la Guinée Bissau à se rapprocher du Sénégal. Parce que la Guinée Bissau et la Casamance, c’est un tampon. Je crois que ça peut aider au-delà de la Guinée Bissau, jusqu’en Guinée Conakry. C’est Pourquoi il faut tournée la page militaire de la gestion de la crise en Casamance et privilégier le dialogue politique qui mettra autour de la table tous les acteurs intéressés par la question. C’est pour cela que j’en appelle à l’organisation d’une conférence nationale et autour de cette conférence nationale, dégager des axes. Je pense que ça peut être une voie assez importante pour faciliter les choses si le président Macky Sall veut avoir un résultat dans la gestion de ce dossier-là. On est sur un terrain miné.
 
Qu’est-ce qui a motivé votre candidature aux sièges de la Diaspora ?
 
Je suis venu comme immigré, j’ai progressivement intégrer la société Française avec toutes les difficultés que les immigrés naturellement peuvent connaitre. Il faut faire ça pour avoir les papiers, il faut faire ça pour avoir un travail, il faut faire ça pour cela…Mais, c’est des choses que je connais. J’ai vu les conditions dans lesquelles, on passe souvent. On n’est pas bien accueillis, on n’est pas bien accompagné, on est laissé en rade…Donc, ce qui fait que ceux qui réussissent, ils ne réussissent pas parce qu’il y’a un cadre d’accueil qui leur permette d’être bien préparé, bien accompagné. Donc, quand on vit toutes ces situations, on se pose des questions, on se dit est-ce qu’il n’y a pas mieux parce qu’on appartient à un Etat. On est Sénégalais. Qu’est-ce que l’Etat fait par rapport à ces personnes qui viennent ici et pourtant ont un plu valu important dans l’économie du Sénégal, dans la stabilité sociale du Sénégal. Qu’est-ce qu’on fait par rapport à ces personnes-là qui ont ce projet de quitter le Sénégal pour venir ici ? En amont comment ces personnes-là sont prépare pour que quand ils arrivent ici, qu’il n’y ait pas de choc. Parce que quitter le Sénégal pour venir ici pour la première fois, c’est un choc très cruel. Parce que  tout simplement, le système de vie n’est pas le même. C’est un monde mécanique. Je pense que c’est des problèmes que j’ai vécu et avec l’engagement que j’ai aussi dans le milieu associatif, je reçois beaucoup de gens, j’écoute beaucoup de Sénégalais parce qu’il n’y a pas que des Casamançais, tous les Africains viennent me voir. Et quand on écoute nos compatriotes, on se rend compte qu’il y’a un problème. Ces problèmes-là, on essaie de leur apporter des solutions. On ne peut pas tout régler parce que la Diaspora n’est pas bien organiser, elle n’est pas bien structurer parce que les politiques qui sont censés nous accompagner dans cette dynamique-là ne font pas le travail. C’est une opportunité pour cette Diaspora d’avoir sa représentation à l’assemblée nationale. Donc, avec tout le travail qu’on a fait, toutes les tentatives qu’on a développé, avec toutes les grandes initiatives auxquelles nous avons participées en tant que structure associative, où nous avons apporté une solution dans les réflexions, dans des propositions, on s’est dit avec toutes ces connaissances-là, on n’a pas le droit de regarder, on n’a pas le droit d’observer.
 
              « Je ne serai pas un député de bureau… »
 
Cette candidature, ce n’est pas parce que moi, personnellement j’ai envie d’être député parce qu’il y’a des avantages au poste de députation, mais je me dis que j’ai envie d’avoir un député qui tient compte de nos difficultés, de nos problèmes et sur ce plan, pour qu’il y’ait un débat, il faut qu’il y ait des personnes qui comprennent, qui connaissent, qui s’engagent. A partir de ce moment, je pense que le débat peut avoir lieu. Les électeurs pourront dire qui est le plus méritant, quel est le programme le plus pertinent, qui est le plus digne de leur confiance ?. Et à partir de ce moment, ils pourront  faire un choix beaucoup plus libre parce que c’est très important, c’est pourquoi, en ce qui me concerne, je me suis déclaré candidat à ces députations. J’accepte effectivement de soumettre ma candidature aux suffrages des Sénégalais avec de bons arguments, qui peuvent convaincre. Je pense qu’effectivement, ils peuvent faire adhérer les gens parce qu’on ne sera pas ce député qu’on va retrouver dans son bureau s’enfermer.

Idrissa SANE - Flashinfos.net, Envoyé Spécial PARIS       

Le Redacteur

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